La Croix de Malte


Mis à jour le 12 janvier 2023

Dans le dallage du vaste chœur de la collégiale figure une magnifique Croix de Malte, remise au jour en février 2000 par des membres de l’association car elle avait été recouverte, pendant des années, par un plancher. Le dallage est constitué de carreaux, posés en alternance de couleur blanche et de couleur noire. La grande croix centrale de l’Ordre de Malte est en marbre blanc au sein d’un carré de dalles noires de 2,70 mètres de côté. À l’intérieur de celui-ci, aux angles, il y a une demi-dalle en marbre blanc, qui met en relief la croix.

La photographie du chœur ci-dessus provient du livre du chanoine Ernest Lotthé : Les églises de la Flandre française – Tome II – Territoire de l’ancienne châtellenie de Lille, SILIC, Lille, 1942.

Conforme à la croix de Malte officielle, elle représente la croix de Jésus-Christ en même temps que les quatre vertus cardinales : justice, prudence, tempérance et force. Le blanc est le symbole de la pureté.
Les huit pointes correspondent aux huit béatitudes enseignées par le Christ lors du Sermon sur la montagne (Saint Mathieu, chapitre 5, verset 3 et suivants).

Curieusement, le chanoine Leuridan n’a pas fait mention de cette croix dans son ouvrage sur l’histoire de la collégiale Saint-Piat de Seclin parue en 1929 et, à notre connaissance, il n’existe pas d’historique sur celle-là. Nous avons donc effectué des recherches dans beaucoup de directions, y compris auprès de l’Ordre de Malte, mais elles ne nous ont pas permis d’aboutir à une conclusion ; ainsi, à ce jour, il est matériellement impossible de savoir pourquoi une telle croix aussi imposante se trouve dans le chœur de la collégiale.

Nous pouvons tout au plus émettre une hypothèse sur son origine, étant bien conscients qu’au hasard de recherches, quelqu’un, un jour, trouvera peut-être une autre solution basée sur des documents fiables.

Seclin, au XVIIème siècle, dépendait d’un seigneur engagiste, le comte d’Avelin. Qu’en était-il d’un seigneur engagiste ? Les rois d’Espagne, dont dépendait alors la Flandre et qui avaient besoin de beaucoup d’argent notamment pour faire la guerre, avaient « vendu » à des nobles, des villes dans lesquelles ils se trouvaient alors nantis de pouvoirs que les textes officiels définissaient ainsi :
« toute la ville, terre et seigneurie, arrentements et revenus de Seclin, avec tous les droits, hauteurs, prééminences et appendances, avec toute justice, haute, moyenne et basse, seules réservées la souveraineté et toutes régales ». À tout moment, le roi pouvait récupérer la ville ainsi « engagée » en remboursant au seigneur concerné la somme qu’il avait versée antérieurement. Lorsque Louis XIV devint maître de la Flandre, il maintint ce système.

Le seigneur engagiste n’avait aucun pouvoir sur le collège des chanoines, donc sur la collégiale. Par contre, au sein de celle-ci, la chapelle qui se trouve dans le transept gauche (donc, à l’opposé de l’autel de saint Piat) appartenait à la paroisse, laquelle était indépendante du collège des chanoines. Et là, le comte d’Avelin pouvait avoir son mot à dire.

C’est ici que nous émettons une hypothèse : dans la famille du comte, il y eut 9 chevaliers de l’Ordre de Malte. Le comte était sans doute, comme partout en pareil cas, un mécène pour la collégiale. Est-il téméraire de suggérer qu’il ait voulu, par cette croix dans le dallage du chœur, laisser comme une signature, ou un signal, en rapport avec ses bienfaits ?

Gérard Hugot